Le patrimoine oral chanté en Bretagne
L’histoire du patrimoine oral chanté en breton possède un certain nombre de similitudes avec son équivalent finlandais. A l’instar de la langue finnoise, jusqu’au début du 20ème siècle,la langue bretonne n’a jamais été une langue de pouvoir. Les chansons de la tradition orale (gwerzioù, sonioù, chants à danser), ont donc été un vecteur très important pour la conservation de la culture, et des histoires, petites ou grandes, évoquant la vie de la population de Basse Bretagne. C’est particulièrement le cas des gwerzioû, nom donné aux complaintes en breton à caractère épique, féérique ou historique qui relatent des histoires considérées comme « vraies » par ceux qui les interprètent, bien qu’elles concernent parfois des faits remontant trois à cinq siècles en arrière - voire plus - de l’arrivée de la peste à Elliant au siège de Guingamp, en passant par d’innombrables histoires de meurtres et de combats!
La révélation de l’originalité de ces gwerzioù aux lecteurs français a d’ailleurs eut un rôle analogue à celle des chants runiques aux lecteurs finlandais! : en 1839 – quatre ans après la publication du Kalevala – paraît le Barzaz Breiz, recueil de chants populaires, fruit des collectes menées essentiellement en Cornouaille par Hersart de la Villemarqué. Premier recueil de chants traditionnels jamais publié en France, l’ouvrage va avoir lui aussi une grande importance pour la reconnaissance de la culture populaire qu’il met en valeur : l’œuvre fait vite référence! ; elle est traduite en de nombreuses langues européennes, et symbolise bientôt la richesse du patrimoine oral breton.
Depuis cette œuvre fondatrice du milieu du 19ème siècle, la collecte de la « littérature orale » bretonne s’est poursuivie, menée durant près de cent ans par des folkloristes publiant des recueils de leurs notations, puis, à partir de la diffusion du magnétophone dans les années 1950, par des « collecteurs » enregistrant les tenants de la tradition orale musicale.
Le patrimoine oral chanté a gardé une certaine vitalité en Bretagne en raison, entre autres, du succès des festoù-noz, inventés dans les années 1950. Mais si les musiques et les chants à danser sont relativement bien transmis, il n’en va pas de même des autres parties du répertoire chanté, aux multiples formes, dans un contexte où la langue bretonne est elle-même en danger : nous espérons que ce projet contribuera, à son niveau, à apporter sa pierre à la préservation de la transmission de l’art du chant en breton.
Créée en 1972, l’association Dastum (« recueillir » en breton) a mis en place une médiathèque regroupant les enquêtes orales réalisées. L’association s’est donné pour but de collecter ou de réunir, de sauvegarder et de diffuser le patrimoine oral de l’ensemble de la Bretagne historique. Cette structure à vocation régionale s’appuie sur un important réseau d’associations locales menant tout ou partie des actions portées par Dastum. C’est particulièrement le cas des « pôles associés » dont le Centre du patrimoine oral en Cornouaille - Dastum Bro Gerne, basé à Quimper.
En Centre Ouest Bretagne, un pôle associé Dastum a longtemps été un lieu de ressource et de référence pour les amateurs et professionnels des répertoires locaux. L’association n’existe plus et les acteurs locaux cherchent à maintenir une dynamique de réseau essoufflée de ce fait ainsi que la transmission des pratiques par ailleurs toujours très vivaces dans la région, qui trouvent de nouveaux lieux d’activités : écoles de musique, soirées Kan ba’r bistro, ateliers lors d’événements festifs culturels…